Aide-soignante, un métier indispensable à la chaîne des soins
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Diplômée depuis 2019, Marcia a commencé à travailler comme aide-soignante juste avant le début de la pandémie de Covid-19. Elle revient ici sur ses années d’études et certaines tâches essentielles qu’elle accomplies au quotidien dans le service pneumologie du CHL.
Qu’est-ce qui vous a amené à suivre la formation d’aide-soignante ?
Marcia : J’ai grandi en Belgique où mes parents ont immigré puis on a déménagé au Luxembourg où j’ai été scolarisée jusqu’à mes 11 ans. Puis je suis partie en Belgique à Virton à l’Athénée Royal jusqu’à la 10e parce que je voulais devenir éducatrice. Mais ce cursus ne me plaisait pas, je suis donc rentrée au Luxembourg. Avec mon bagage, la seule formation qui me plaisait était celle pour devenir aide-soignante. Je me suis donc inscrite au LTPS à Strassen.
J’ai aussi voulu apprendre le luxembourgeois. À l’école au Luxembourg, comme je parlais français tout le monde me parlait français et non en luxembourgeois. Ma mère m’a donc acheté plusieurs méthodes de langues pour que je l’apprenne. J’ai dû me débrouiller moi-même. Et cette langue s’est installée tout doucement, après mes 14 ans et maintenant, ça va ! Je parle donc portugais, français et luxembourgeois.
Que pensez-vous de vos années d’études au LTPS ?
Marcia : C’était formidable ! Franchement, je retournerais à l’école sans souci ! J’aime étudier et apprendre tous les jours et donc ces 3 années m’ont épanouie. J’ai appris la base de mon métier à l’école puis après, avec l’expérience, on apprend toujours, même au travail. Pendant mes années d’études au LTPS, j’ai eu de bons moments de rigolade mais aussi et surtout des moments où il faut être concentré. Aucune matière ne se ressemble. Nos professeurs sont un peu comme « nos parents » ; si on a besoin d’aide, ils sont là pour nous, à tout moment. Ils sont très humains et nous soutiennent vraiment. Pour moi, la 1ère année était difficile parce qu’on n’a évidemment aucune base et j’ai vraiment eu du mal avec certains sujets abordés comme par exemple, la physiologie des poumons. À ce moment-là, je ne voyais pas vraiment la raison pour laquelle on devait apprendre tout ça en détail. D’autant qu’on m’avait toujours dit que le métier d’aide-soignante, c’est « laver ». Donc, pour moi, les cours allaient se limiter aux soins et à l’hygiène. Mais pas du tout ! Et concernant ce sujet, je l’ai bien étudié et j’ai passé le test sans problème. J’avais tout compris !
Au LTPS, nos professeurs sont un peu comme « nos parents » ; si on a besoin d’aide, ils sont là pour nous, à tout moment. Ils sont très humains et nous soutiennent vraiment.
Et maintenant, voyez-vous l’utilité de connaître certains détails comme la physiologie des poumons ?
Marcia : Ah oui ! Surtout que je travaille dans le service de pneumologie maintenant. Et évidemment, ça m’a bien aidé lorsque nous avons eu des patients affectés par la Covid. Dans notre service, on prenait en charge les patients infectés. Pendant cette « période Covid », j’ai énormément appris. J’ai commencé à travailler dans le service en 2019, juste avant la pandémie. J’avais alors très peu d’expérience mais cette période intense m’a fait grandir, comme nombre de mes collègues d’ailleurs.
Pour revenir aux cours en 1ère année, il y avait aussi des cours sur la législation ; ce qu’on peut et ne peut pas faire dans notre métier d’aide-soignant. J’ai raté cet examen… j’étais assez désespérée parce que j’ai dû le repasser. Maintenant, je me dis que ces acquis sont très importants pour prendre soin de nos patients. Nos responsabilités couvrent un certain champ et comme on travaille dans une équipe pluridisciplinaire, l’infirmière ou le médecin ont d’autres droits et obligations que les aides-soignants et on peut agir ensemble pour prendre soin du patient. Dans notre travail, on est autonome mais pour certains actes, l’infirmière doit être avec nous dans la chambre ou dans les environs. Et bien sûr, toutes ces procédures, on doit les connaître !
Aussi, en 2e année, on aborde les maladies de l’estomac. Il y en a environ 12 à connaître pour le test, avec définition, causes et tout ! Mais bon, je n’ai jamais raté une année même si certains cours sont très demandeurs et pas toujours évidents. Aide-soignante, ce n’est pas uniquement s’occuper de la toilette des patients. C’est n’est pas vrai.
Comment casser cette perception de l’aide-soignante qui « ne s’occupe que de la toilette du patient » ?
Marcia : Déjà, dès le début des cours, on voit bien qu’il n’y a pas que ça. On doit connaître le corps humain, les pathologies, etc. On a des matières sur les techniques de soins, la manipulation du patient, la façon dont on doit se positionner pour éviter de nous faire mal et de souffrir du mal de dos, etc. Il faut avoir de l’amour pour faire ce métier et surtout aimer le contact avec les gens, ressentir de l’empathie parce que c’est l’essence du métier.
Quand j’ai annoncé à mon entourage que je m’engageais dans le cursus pour être aide-soignante, c’est ce que tout le monde me disait. Et ils ne trouvaient pas ce travail intéressant. L’image véhiculée de l’aide-soignante est tellement encrée dans la perception de beaucoup de gens, il faut que les jeunes s’y intéressent pour voir au-delà. Par exemple, ma petite sœur se moquait de moi lorsque je me suis lancée dans mes études et maintenant, elle est en 3e année aide-soignante au LTPS.
Et de toute façon, même si ça se limite à la toilette du patient, nous, les aides-soignantes, sommes les premières personnes à voir comment va le patient, s’il y a un problème et à le reporter aux infirmières. Aussi, faire la toilette d’une personne, c’est aussi lui rendre sa dignité. Pour une personne qui ne peut plus bouger, on fait tout pour elle. Et pour les patients qui ont encore un peu d’autonomie et qui sont tout à fait conscients de leur état, on peut toujours les stimuler et les laisser faire à leur manière. Parce que ce n’est pas évident de laver un patient qui a toute sa tête et qui ne peut plus prendre soin de lui-même. À mon âge, je n’aimerais pas qu’on me lave. Et moi, souvent, à l’hôpital, je fais la toilette de patients qui ont mon âge. On rentre dans son intimité et ce n’est pas évident, autant pour le patient que pour moi.
Comment gérez-vous ce moment-là ? Est-ce que vous avez une certaine approche avec le patient ?
Marcia : J’ai plus de difficultés à laver un jeune qu’une personne plus âgée parce que je me mets à sa place. J’essaye de ne pas montrer ma gêne et c’est en parlant avec le patient que je suis à l’aise pour faire mon travail. On parle de la raison pour laquelle il est hospitalisé, même si je le sais parce que j’ai lu le rapport à la prise de mon poste. Les discussions aident à mettre tout le monde à l’aise. En plus, grâce à ces conversations, on crée un lien. On connaît alors un peu la vie de chacun, leur métier, leurs enfants, etc.
J’occupe le poste de gestion du matériel et notamment de la VNI utilisée après avis du médecin. Ces machines doivent toujours être fonctionnelles à tout moment. Pour ce faire, je vérifie régulièrement leur bon fonctionnement et je les installe dans la chambre du patient qui en a besoin, après l’accord de l’infirmière.
Est-ce que vous êtes à l’aise avec ce que vous pouvez faire en tant qu’aide-soignante ?
Marcia : Tout à fait. Je sais ce que j’ai à faire et jusqu’où. Il y a quelques différences avec ce qu’on apprend à l’école pour certains actes. Par exemple, à l’école, on nous apprend à injecter l’insuline chez les patients diabétiques mais à l’hôpital, certains patients ne sont pas stables et l’aide-soignante ne fait pas cet acte.
Je travaille toujours en binôme avec une infirmière. Et j’ai d’autres responsabilités car j’occupe le poste de gestion du matériel avec d’autres aides-soignantes qui sont dans le même étage que moi. Dans notre service, nous utilisons diverses machines ; par exemple, pour aider les patients atteints d’une BPCO (bronchopneumopathie chronique obstructive) à mieux respirer, on utilise une VNI (ventilation non invasive) ou l’AirvoTM après avis du médecin. Ces machines doivent toujours être fonctionnelles à tout moment. Pour ce faire, je vérifie régulièrement leur bon fonctionnement et je les installe dans la chambre du patient qui en a besoin, après l’accord de l’infirmière.
Où vouliez-vous exercer lorsque vous avez obtenu votre diplôme ? À l’hôpital, à domicile, dans une maison de soins ou dans une autre structure ?
Marcia : Pendant mes études, j’ai préféré attendre de faire mes stages qui se font dans différents secteurs avant de me décider et quand j’ai fait mon stage à l’hôpital, je me suis vraiment sentie à ma place. D’ailleurs, on n’a qu’un stage à l’hôpital quand on suit les études d’aide-soignante et c’est dommage parce que j’aurais aimé en faire d’autres. À l’hôpital, on a le stress qu’on n’a pas en maison de soins. Un bon stress, bien sûr. On a toujours à faire, aucune journée ne se ressemble, les patients changent régulièrement. J’ai le sentiment d’apprendre tous les jours. Je ne dis pas que ce n’est pas le cas en maison de soins ou à domicile mais le fait que les patients restent plusieurs années ne me convenait pas. À l’hôpital, ça change tous les jours. Il y a des maladies que je n’ai pas étudiées à l’école et ça rajoute à mes connaissances. Aujourd’hui, je ne me vois pas travailler dans un autre établissement. Peut-être un jour, en rééducation… mais pour le moment, je suis bien là où je suis.
Quand j’étais au LTPS et que j’ai fait mon stage à l’hôpital, je me suis vraiment sentie à ma place. À l’hôpital, on a toujours à faire, aucune journée ne se ressemble, les patients changent régulièrement. J’ai le sentiment d’apprendre tous les jours.
Est-ce que vous suivez des formations de temps en temps ?
Marcia : Oui, à l’hôpital, on a beaucoup de formations. Pendant la pandémie, le programme habituel a été suspendu pour se focaliser sur la Covid. Depuis que j’occupe mon poste, j’ai eu une formation de 4 heures sur les électrocardiogrammes (ECG) qui permettent aux médecins de voir si le patient a fait un infarctus par exemple. Et puis j’ai suivi d’autres formations spécifiques à la pneumologie, sur les isolements (méthode utilisée pour empêcher la propagation d’un virus quand un patient est infecté), une formation d’une journée sur la prise en charge de la douleur, et une autre sur le deuil, etc. Ce sont souvent des thématiques que je n’avais pas étudié à l’école et que j’apprends à l’hôpital. Elles peuvent être proposées à toutes les personnes du service. Et on peut aussi demander des formations sur des thématiques qui nous intéressent puisqu’on a droit à 40 heures de formation par an. Pendant ces temps-là, on partage nos diverses expériences avec d’autres collègues. Ça aussi, ça donne d’autres idées pour éventuellement changer notre façon de faire. Il y a des formations pour nous faire des petits rappels aussi parce qu’il y a certains actes que nous ne faisons pas tous les jours et on peut les oublier avec le temps.
Il y a souvent des thématiques de formation au travail que je n’avais pas étudié à l’école et que j’apprends à l’hôpital.
Combien de patients bénéficient des soins au quotidien ?
Marcia : Dans le service, il y a 19 chambres qui comptent deux patients et sont divisées sur trois équipes constituées de deux infirmières ou d’une infirmière et d’une aide-soignante. Chaque jour, jusqu’à 14 patients reçoivent les soins d’une équipe.
Quel est votre rôle dans les admissions et les sorties des patients ?
Marcia : Quand j’accueille un patient dans notre service, je me présente, j’installe le patient dans sa chambre, je mesure plusieurs paramètres. Je le pèse, le mesure et donc avec son poids et sa taille, je calcule son indice de masse corporelle (IMC). Je lui pose des questions sur ses habitudes de vie, s’il est essoufflé, ses habitudes alimentaires, ses antécédents, les traitements médicamenteux qu’il prend en ce moment, sur la douleur qu’il peut ressentir, la dernière fois qu’il est allé à la selle, etc. Je note aussi le motif de son admission dans notre service, le nom du médecin qui a demandé son transfert chez nous. Je prends note de toutes ces informations sur un document d’admission que je retranscris ensuite dans son dossier médical informatisé.
Pendant l’hospitalisation, nous, les aides-soignantes et les infirmières, réévaluons les paramètres des patients tous les weekends. Ça permet d’assurer le suivi de l’état de santé de nos patients. Pour chacun d’eux, on recalcule leur IMC, on fait le point sur leur traitement médicamenteux en cours, mais aussi leurs conditions sociales, leur autonomie pour ceux qui vont rentrer prochainement à la maison, etc. et on les inscrits dans leur dossier.
Quand un patient quitte notre service, on doit d’abord reprendre tous les paramètres comme l’IMC par exemple. Pour son départ, tout dépend si le patient est autonome, en aide partielle ou complétement dépendant, s’il a besoin d’une ambulance pour rentrer à la maison ou en maison de soins. L’infirmière de liaison organise son retour ou peut me déléguer certaines tâches comme programmer le transport ; je dois préciser si le patient doit être alité, assis, avec oxygène. Je remplis ensuite toutes ces données concernant sa sortie sur l’ordinateur. On s’assure que le patient part avec toutes les informations qui lui sont nécessaires pour son suivi médical. S’il va en maison de soins par exemple, ces données sont transmises à l’établissement où il se rend. Le tout est accompagné par le rapport de sortie du médecin.
Est-ce que vous êtes en contact avec les familles ?
Marcia : Oui, ma responsable tient vraiment à ce qu’on rentre en contact avec la famille, qu’on soit à leur écoute. D’autant que la situation n’est pas facile pour elle, la famille est souvent inquiète. L’infirmière de liaison remplit un grand rôle ici. Elle renseigne les familles sur leur proche hospitalisé. Aussi, si un membre de la famille vient nous voir pour avoir des informations, on appelle le médecin pour qu’ils se rencontrent.
C’est un métier dans lequel on apprend tous les jours quel que soit l’établissement dans lequel on travaille.
Est-ce que vous vous projetez en tant qu’aide-soignante à l’hôpital pendant plusieurs années ou vous avez d’autres envies ?
Marcia : Je me vois qu’à l’hôpital pour le moment. C’est le lieu de travail que je préfère. J’aime l’intensité des activités que je mène. Je ne dis pas que je ne changerai pas un jour parce qu’on ne sait pas ce que nous réserve l’avenir mais pour le moment, je suis dans mon élément. Dans mon métier, il y a toujours quelque chose à faire pour être sûre que chaque patient soit au mieux. Je travaille sur les postes du matin et de l’après-midi et pour mon organisation personnelle, c’est très bien. Pendant la pandémie, je n’ai assuré que des postes de nuit. Je suis actuellement en congé maternité mais dès que je reprendrai comme avant, matin et après-midi, à plein temps.
Quelles sont les qualités et les compétences que l’on n’apprend pas à l’école qu’il faut avoir pour exercer ce métier ?
Marcia : Depuis que j’exerce mon métier, j’ai appris qu’il faut être sincère et avoir de l’empathie. Ce sont des termes qu’on apprend à l’école mais lorsqu’on vit son métier, on devient comme ça. On doit comprendre ce que vit le patient, se mettre à sa place. Peu importe son âge. Savoir se mettre à sa place permet de mieux comprendre sa situation. Et bien sûr, il faut avoir de l’amour pour son métier. C’est aussi en exerçant notre métier qu’on apprend à l’aimer. Et moi, j’aime ce que je fais. Ceux qui hésitent à s’engager, je leur dis de ne pas hésiter. C’est un métier dans lequel on apprend tous les jours quel que soit l’établissement dans lequel on travaille. On rencontre des patients qui partagent des moments de leur vie. C’est passionnant.